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Fausto Romitelli - The Nameless City : DIAPASON D'OR - Cypres - CYP5623 - Sortie en Belgique : 13 mars 2012 / En France : 12 avril 2012

Référence CYP5623 - DIAPASON D'OR
Disponible chez Cypres : ICI
Extraits en streaming et téléchargement sur Qobuz
 
TEASER : Entretien avec Jean-Paul Dessy et Cédric Hustinx >>> EN VIDEO ICI
COUP DE COEUR de Jean-Pierre Derrien : 2 avril 2012 - 21h30 sur France Musique (Les lundis de la Contemporaine)Musiques NouvellesL'ENSEMBLE, sous la direction de Jean-Paul Dessy
Site officiel du label CYPRES

[La création de Fausto Romitelli] est investie d'une puissance expressive hors du commun, fascinante, avant tout parce qu'elle est témoignage, document sonore d'une perception bien à lui, et à lui seul, de la réalité. (Romitelli au futur antérieurEric Denut – notice de l'album)

01. Amok Koma, pour ensemble- 2001 -12'

Créé par l'Ensemble l'Itinéraire dirigé par Mark Foster, Festival Manca, Théâtre de Nice, le 11 novembre 2001

02. Flowing down too slow, pour 9 cordes, percussion et 2 échantillonneurs -2001 - 10'

Créé par Musiques Nouvelles et Art Zoyd dirigés par Jean-Paul Dessy, Festival de Vandœuvre, Nancy, 27 mai 2001.

03. Domeniche alla periferia dell'impero. Seconda domenica : hommage à Gérard Grisey- 2000, 5'

Créé par l'Ensemble Fa dirigé par Dominique My, Festival Présence de Radio France, Paris, 10 février 2001

04. Nell‘alto dei giorni immobili -1990 –11'

Créé par l'Ensemble Recherche au festival Nuove Sincronie, Milan, novembre 1990.

05. The Nameless City, string orchestra et cloche, 1997 - 13'

Créé par l'Ensemble Musica Vitae dirigé par Peter Csaba, Göteborg le 23 avril 1997

 
DISTRIBUTION
Musiques NouvellesL'ENSEMBLE: David Nuñez, Antoine Maisonhaute, Erik Sluys, Cristina Constantinescu, Claire Lechien, Pierre Heneaux - Nicolas Marciano - Pascal Prégardien - Margaret Hermant (violons) - Dominica Eyckmans, Paul De Clerck, Manuela Bucher (altos)- Jean-Pol Zanutel, Jean-Luc Brulin (violoncelles) - Mathias Bauer (contrebasse) - Berten D'Hollander (flûte)- Jean-Michel Charlier, Charles Michiels (clarinettes)- Jean-Michel Monart (percussions)- Kim Van den Brempt (piano)- Vincent Bruyninckx, Kim Van Den Brempt (électronique, échantillonneurs, clavier)

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Enregistrement par Daniel Léon les 17, 18 et 29 mai 2007 à l'Auditorium Abel Dubois à Mons

Mixage: Jarek Frankowski & Jean-Paul Dessy

Montage: Daniel Léon & David Nuñez

Mastering: Jarek Frankowski

Notice du livret : Eric Denut

Fausto Romitelli: vitalité et jubilation – Jean-Paul Dessy

Fausto Romitelli était un homme rayonnant, extrêmement souriant et joyeux. C'est au téléphone que nous nous sommes rencontrés pour la première fois avant 1993; j'avais un quatuor nommé Quadro et il avait envie que nous créions une pièce qu'il écrirait pour nous. Sa voix dopée de sympathie et d'esprit de communication débordait d'enthousiasme. Elle était très particulière, un peu métallisée et rocailleuse aussi, car il grasseyait les «R», ce qui reste assez rare en Italie… Son rire était tout aussi extraordinaire et généreux. Fausto n'avait rien de l'artiste maudit, ni dans son élégance sobre et classique, ni dans son caractère: d'une beauté solaire, il s'inscrivait pleinement dans la vie, avec jubilation. Il me semble important de le souligner, afin que les textes écrits savamment et avec justesse sur sa musique, ne nous conduisent pas à l'imaginer dans l'écartèlement ou la corrosion déliquescente.

Nous sommes devenus très amis. Nous étions nés à une semaine d'écart, lui le 1er février 1963, moi le 8. Nous avions tous deux la certitude que nos musiques, pour des raisons différentes, étaient déviantes par rapport à la pensée, aux institutions et aux cursus dominants. Il détestait l'appellation de «musique contemporaine», mais en même temps, il avait tout digéré de ce qu'elle pouvait évoquer, dans un parcours presque exemplaire de tous les savoirs disponibles en Italie et à Paris, afin d'être d'autant plus libre de leur emprise qu'il les connaissait mieux que personne.

Lorsque Musiques Nouvelles s'est déployé, nous avons pu lui faire commande d'une pièce intégrant l'électronique à l'ensemble. Fausto a réalisé la partie électronique de Professor Bad Trip (qui devint plus tard la «Lesson One») à Liège au Centre de recherches musicales de Wallonie (devenu aujourd'hui le Centre Henri Pousseur) avec Jean-Marc Sullon. C'était une heureuse période de franche ébullition. Nous lui avons ensuite fait une commande commune avec Art Zoyd: Flowing down too slow… Nous l'avons enregistré dans le cadre des Expériences de vol mais la version du cd qui sort chez Cyprès est toute nouvelle, forte de ma plus grande familiarité avec l'univers de Fausto.

S'il n'est plus ici aujourd'hui, sa musique nous transmet toujours sa force: une vitalité belle et puissante. C'est la participation à l'acte de création du monde qui est à l'œuvre chez Romitelli.

FAUSTO ROMITELLI - Biographie

Né en 1963 à Gorizia (Italie), Fausto Romitelli disparaît prématurément en 2004 des suites d'une longue maladie.

Son œuvre affirme avec intransigeance l'honnêteté d'un enfant du siècle: sa conscience aiguë d'une époque tétanisée par le synthétique, le digital et les artefacts en saisit l'énergie violente et débridée afin d'en organiser la dramaturgie avec une vitalité qui ne craint pas de désorienter plus encore. L'artificiel, le distordu, le filtré, voilà ce qui est la nature des hommes d'aujourd'hui.*

Il étudie les nouvelles technologies à l'Ircam où il collabore comme «compositeur en recherche» de 1993 à 1995, nourri par la volonté de présence sonore des théories spectrales, immobile et continue, hypnotique, sphérique et roulant dans le temps et dans l'espace qu'il immerge bientôt dans les perspectives dépravées de la distorsion et la saturation. Eric Denut, auteur de nombreuses contributions sur la musique contemporaine, remarque combien Fausto Romitelli désire «en découdre avec le son, le violenter pour mieux le tutoyer». Le compositeur écrit d'ailleurs lui-même en 2003, à propos de An Index of Metals (vidéopéra pour soprano, ensemble de 11 instruments, électronique et multiprojection):

Au centre de mon activité de compositeur se trouve l'idée de considérer le son comme matière à forger. Grain, épaisseur, porosité, brillance, densité, élasticité sont les caractéristiques principales de ces sculptures du son obtenues par l'amplification, les traits électro-acoustiques, mais aussi l'écriture purement instrumentale. Après Professor Bad Trip où les harmonies sont comme perçues sous mescaline: saturées, distordues, liquéfiées, il m'a semblé indispensable de poursuivre cette recherche aux limites de la perception en projetant le timbre comme une lumière. Aller au bout de cette hallucination qui rend le son visuel.

Fausto Romitelli ne s'est pas contenté de décloisonner la frontière entre musique savante et musique populaire: entre Stockhausen ou Grisey et Sonic Youth ou Aphex Twin vibre la même perception physique et immédiate du son dont la composition est une affirmation jubilatoire. La musique écrite canalise l'inspiration paroxystique des technologies instrumentales actuelles, elle organise la dramaturgie des rythmes et des timbres exacerbés en malmenant le formalisme, entre déflagrations, déchirures et dépressions. Comme le précise encore avec pénétration Eric Denut: «L'enjeu de la composition chez Romitelli pourrait s'énoncer ainsi: irriguer le formalisme propre à toute écriture d'une vitalité qui le déchire sans tout à fait l'annihiler.»

Sa violence libératrice provoque des séismes formels qui, contre toutes nos attentes, figurent pour nos sens déréglés un imaginaire sonore irréductiblement mutant. (I.F.)

* Toutes les citations en italique sont des propos de Fausto Romitelli.
Photos : Cypres, Jarek Frankowski.