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"The Nameless City" de Fausto Romitelli chez Cypres - ARS MUSICA - Présentation à la presse et au public

ARS MUSICA - Flagey - Studio 4
Musiques NouvellesL'ENSEMBLE sous la direction de Jean-Paul Dessy
>>> CYP5623 : en savoir plus...
Pour l'occasion, Musiques NouvellesL'ENSEMBLE jouera sous la direction de Jean-Paul Dessy, la pièce
 
Domeniche alla periferia dell'impero
 
avec Berten D'Hollander (flûte), Charles Michiels (clarinette), Antoine Maisonhaute (violon) et Jean-Pol Zanutel (violoncelle).

Contenu de l'album

Amok Koma, pour ensemble - 2001 - 12'
Créé par l'Ensemble l'Itinéraire dirigé par Mark Foster, Festival Manca, Théâtre de Nice, le 11 novembre 2001
Interprètes : Berten D'Hollander (flûte) - Jean-Michel Charlier, Charles Michiels (clarinettes) - Jean-Michel Monart (percussions) - Kim Van den Brempt (clavier) - Vincent Bruyninckx (électronique) - David Nuñez (violon) - Dominica Eyckmans (alto) - Jean-Pol Zanutel (violoncelle)
 
NOTE DE PROGRAMME
Dans cette œuvre, je suis parti d'une idée très simple : celle de la répétition/dégradation du matériau. Les processus linéaires, prévisibles et donc rassurants, se verront orienter progressivement vers les pôles extrêmes que sont le silence et la saturation, grâce à des ralentissements jusqu'à l'immobilité ou à des accélérations jusqu'au paroxysme. L'idée de « processus musical » est seulement un prétexte me permettant de rendre perceptible ce qui m'intéresse véritablement : l'avènement d'une violence cachée qui se révèle seulement par la dérive chaotique du matériau, par le rituel de sa destruction comme élément discursif porteur de forme et sa résurrection comme matériau incandescent, dès lors, hors de tout contrôle.

Fausto Romitelli

Flowing down too slow, pour 9 cordes, percussion et 2 échantillonneurs - 2001 - 10'
Créé par Musiques Nouvelles et Art Zoyd dirigés par Jean-Paul Dessy, Festival de Vandoeuvre, Nancy, 27 mai 2001.

Interprètes : David Nuñez, Antoine Maisonhaute, Erik Sluys, Claire Lechien (violons) - Dominica Eyckmans, Paul De Clerck (altos) - Jean-Pol Zanutel - Jean-Luc Brulin (violoncelles) - Mathias Bauer (contrebasse) - Jean-Michel Monart (percussions) - Vincent Bruyninckx, Kim Van den Brempt (échantillonneurs)

 

Domeniche alla periferia dell'impero. Seconda domenica: hommage à Gérard Grisey - 2000, 5'

Créé par l'Ensemble Fa dirigé par Dominique My, Festival Présence de Radio France, Paris, 10 février 2001
Interprètes : Berten D'Hollander (flûte & pitch pipe) - Charles Michiels (clarinette, kazoo & harmonica) - David Nuñez (violon) - Jean-Pol Zanutel (violoncelle)
Nell‘alto dei giorni immobili - 1990 - 11'
Créé par l'Ensemble Recherche au festival Nuove Sincronie, Milan, novembre 1990.

Interprètes : Berten D'Hollander (flûte) - Charles Michiels (clarinette) - Kim Van den Brempt (clavier) - David Nuñez (violon) - Dominica Eyckmans (alto) - Jean-Pol Zanutel (violoncelle)

The Nameless City, string orchestra et cloche, 1997, 13'
Créé par l'Ensemble Musica Vitae dirigé par Peter Csaba, Göteborg le 23 avril 1997

Interprètes : David Nuñez - Antoine Maisonhaute - Claire Lechien - Pierre Heneaux - Nicolas Marciano - Cristina Constantinescu - Erik Sluys - Pascal Prégardien - Margaret Hermant (violons) - Dominica Eyckmans - Paul Declerck - Manuela Bucher (altos) - Jean-Pol Zanutel - Jean-Luc Brulin (violoncelles) - Mathias Bauer (contrebasse)

 
Montage par Daniel Léon et David Nunez .

Mixage par Jarek Frankowski et Jean-Paul Dessy

Textes: Eric Denut et Jean-Paul Dessy
 
Enregistrement par Daniel Léon les 17, 18 et 29 mai 2007 à l'Auditorium Abel Dubois à Mons

Fausto Romitelli: vitalité et jubilation – Jean-Paul Dessy

Fausto Romitelli était un homme rayonnant, extrêmement souriant et joyeux. C'est au téléphone que nous nous sommes rencontrés pour la première fois avant 1993; j'avais un quatuor nommé Quadro et il avait envie que nous créions une pièce qu'il écrirait pour nous. Sa voix dopée de sympathie et d'esprit de communication débordait d'enthousiasme. Elle était très particulière, un peu métallisée et rocailleuse aussi, car il grasseyait les «R», ce qui reste assez rare en Italie… Son rire était tout aussi extraordinaire et généreux. Fausto n'avait rien de l'artiste maudit, ni dans son élégance sobre et classique, ni dans son caractère: d'une beauté solaire, il s'inscrivait pleinement dans la vie, avec jubilation. Il me semble important de le souligner, afin que les textes écrits savamment et avec justesse sur sa musique, ne nous conduisent pas à l'imaginer dans l'écartèlement ou la corrosion déliquescente.
 
Nous sommes devenus très amis. Nous étions nés à une semaine d'écart, lui le 1er février 1963, moi le 8. Nous avions tous deux la certitude que nos musiques, pour des raisons différentes, étaient déviantes par rapport à la pensée, aux institutions et aux cursus dominants. Il détestait l'appellation de «musique contemporaine», mais en même temps, il avait tout digéré de ce qu'elle pouvait évoquer, dans un parcours presque exemplaire de tous les savoirs disponibles en Italie et à Paris, afin d'être d'autant plus libre de leur emprise qu'il les connaissait mieux que personne.
 

Lorsque Musiques Nouvelles s'est déployé, nous avons pu lui faire commande d'une pièce intégrant l'électronique à l'ensemble. Fausto a réalisé la partie électronique de Professor Bad Trip (qui devint plus tard la «Lesson One») à Liège au Centre de recherches musicales de Wallonie (devenu aujourd'hui le Centre Henri Pousseur) avec Jean-Marc Sullon. C'était une heureuse période de franche ébullition. Nous lui avons ensuite fait une commande commune avec Art Zoyd: Flowing down too slow… Nous l'avons enregistré dans le cadre des Expériences de vol mais la version du cd qui sort chez Cyprès est toute nouvelle, forte de ma plus grande familiarité avec l'univers de Fausto.

S'il n'est plus ici aujourd'hui, sa musique nous transmet toujours sa force: une vitalité belle et puissante. C'est la participation à l'acte de création du monde qui est à l'œuvre chez Romitelli.

FAUSTO ROMITELLI

Né en 1963 à Gorizia (Italie), Fausto Romitelli disparaît prématurément en 2004 des suites d'une longue maladie.

Son œuvre affirme avec intransigeance l'honnêteté d'un enfant du siècle: sa conscience aiguë d'une époque tétanisée par le synthétique, le digital et les artefacts en saisit l'énergie violente et débridée afin d'en organiser la dramaturgie avec une vitalité qui ne craint pas de désorienter plus encore. L'artificiel, le distordu, le filtré, voilà ce qui est la nature des hommes d'aujourd'hui.*
 
Il étudie les nouvelles technologies à l'Ircam où il collabore comme «compositeur en recherche» de 1993 à 1995, nourri par la volonté de présence sonore des théories spectrales, immobile et continue, hypnotique, sphérique et roulant dans le temps et dans l'espace qu'il immerge bientôt dans les perspectives dépravées de la distorsion et la saturation. Eric Denut, auteur de nombreuses contributions sur la musique contemporaine, remarque combien Fausto Romitelli désire «en découdre avec le son, le violenter pour mieux le tutoyer». Le compositeur écrit d'ailleurs lui-même en 2003, à propos de An Index of Metals (vidéopéra pour soprano, ensemble de 11 instruments, électronique et multiprojection):
 Au centre de mon activité de compositeur se trouve l'idée de considérer le son comme matière à forger. Grain, épaisseur, porosité, brillance, densité, élasticité sont les caractéristiques principales de ces sculptures du son obtenues par l'amplification, les traits électro-acoustiques, mais aussi l'écriture purement instrumentale. Après Professor Bad Trip où les harmonies sont comme perçues sous mescaline: saturées, distordues, liquéfiées, il m'a semblé indispensable de poursuivre cette recherche aux limites de la perception en projetant le timbre comme une lumière. Aller au bout de cette hallucination qui rend le son visuel.
 

Fausto Romitelli ne s'est pas contenté de décloisonner la frontière entre musique savante et musique populaire: entre Stockhausen ou Grisey et Sonic Youth ou Aphex Twin vibre la même perception physique et immédiate du son dont la composition est une affirmation jubilatoire. La musique écrite canalise l'inspiration paroxystique des technologies instrumentales actuelles, elle organise la dramaturgie des rythmes et des timbres exacerbés en malmenant le formalisme, entre déflagrations, déchirures et dépressions. Comme le précise encore avec pénétration Eric Denut: «L'enjeu de la composition chez Romitelli pourrait s'énoncer ainsi: irriguer le formalisme propre à toute écriture d'une vitalité qui le déchire sans tout à fait l'annihiler.»
 
Sa violence libératrice provoque des séismes formels qui, contre toutes nos attentes, figurent pour nos sens déréglés un imaginaire sonore irréductiblement mutant.
 
* Toutes les citations en italique sont des propos de Fausto Romitelli.
 
                                                                  Isabelle Françaix - Février 2012

Liens

Eric Denut sur le site d'Ictus : Romitelli - A Short index
 

Représentations passées

13/03/2012
Flagey - 1050 Ixelles

Photos : Jarek Frankowski, Cypres - CYP5623. Télécharger les photos.