Tana aux Midis-Minimes - Philippe Boesmans / Baudouin de Jaer (création mondiale)

 

Philippe Boesmans (1936-)
Quatuor n°2 “Summer Dreams”

Baudouin de Jaer (1962-)
Kangwon-do (création mondiale)

 

Parmi tous les genres que recouvre la musique de chambre, le quatuor à cordes est unanimement considéré comme le plus noble et le plus abouti. Quasiment tous les grands compositeurs postérieurs à la seconde moitié du XVIIIème siècle s'y sont essayés, et ont consacré à leurs quatuors la partie la plus intime de leur inspiration, leur génie le plus personnel.

L'équilibre miraculeux des quatre voix d'une famille d'instruments homogène, créant une sonorité unique et immédiatement reconnaissable d'une part, et l'individualité propre de chacun de ces instruments (et des musiciens qui les jouent) d'autre part, voilà qui constitue une dualité extrêmement riche, propre à éveiller les meilleures inspirations; ce va-et-vient permanent entre le social et l'individuel, le personnel et le collectif, propre à cette formation va, chez beaucoup de compositeurs, entrer en résonance avec leurs questionnements intimes, leurs doutes de créateurs, leur statut professionnel ou leur situation personnelle. Chaque compositeur successivement, et parmi eux les plus prestigieux, apportera son élément de réponse à ce questionnement, construisant ainsi un édifice parmi les plus imposants de l'histoire de la musique, les réussites incontestables des uns (Haydn, Mozart, au XVIIIème, Beethoven, Schubert, Brahms, Dvoràk, au XIXème, Bartόk, Chostakovitch, Martinu, Scelsi, ou Rihm pour le XXème siècle) stimulant l'inspiration des autres.

Philippe Boesmans, même s'il s'est surtout rendu célèbre par ses opéras – il en compte déjà cinq à son actif, tous créés à la Monnaie et dont la plupart ont été des succès dépassant largement les frontières belges - a déjà composé deux quatuors. Un premier, écrit en 1988, et ce second, qui date de 1994. Cette époque se situe, dans la production des opéras de Boesmans, entre Reigen (1993) et Wintermärchen (1999). Avec beaucoup de caractère et une constante recherche de couleur instrumentale, Boesmans explore, dans son quatuor, une écriture à la fois plus personnelle et plus audacieuse que dans ses opéras, plus éloignée de ses sources habituelles, et résolument ancrée dans la modernité.
Summer Dreams a fait l'objet d'un enregistrement très réussi par le Quatuor Arditti.

Violoniste et compositeur, bassiste dans le quartet KOBA, Baudouin de Jaer a été formé au Conservatoire Royal de Musique de Liège et à l'Université Mac Gill de Montréal. Il compose pour divers ensembles musicaux (Orchestre Philharmonique de Liège, Quatuor Arditti…), pour la danse (Anar Danse-Canada, la Compagnie Pierre Droulers, la compagnie Eco in the dream), ou pour le théâtre (Groupov/compagnie de Jacques Delcuvellerie).
L'Asie fascine Baudouin de Jaer depuis de nombreuses années ; le quatuor Kangwon-do fut composé dans la province du même nom, une magnifique région au nord-est de la Corée du Sud, aux paysages montagneux, face au Japon.
La partie centrale du quatuor se veut la description géométrique circulaire d'une forme conique - pointe au centre - qui se déplace de gauche à droite en 15 étapes successives. De part et d'autre de ce mouvement central, on trouve deux mouvements extrêmes ; l'un rapide et tubulaire - enchevêtrement de cycles, l'autre lent, morcelé et aérien.
Le compositeur laisse aux musiciens le choix de commencer par l'une ou l'autre de ces deux parties extrêmes. La continuité de l'œuvre est assurée par le jeu pizzicato, sorte de fil conducteur qui relie les formes entre elles et trace en pointillé leurs déplacements.


Claude Jottrand